Le temps d'une soirée (Lys)

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Y avait eu cette journée. Si banale ? Normale ? Oué, surement. Une journée passée assis à ton bureau à remplir dossier sur dossier. C’était surement ce que tu détestais le plus. Dans ton métier. Tous ces papiers à remplir, à lire, comprendre. Pour pouvoir sortir tes clients de là. Pour gagner. Mais, c’était le plus chiant.

Chiant.
Comme aujourd’hui qui te paraissait si long.
Journée à rallonge.
Tu entends l’horloge égrainer ses heures.
Tic, tac.
Tic, tac.

Est-ce parce que tu sais que. Ce soir, il sera là. Chez toi. Il sera là pour rire et boire ? Il sera là dans le vide sidéral qu’est ta vie. Ta maison. Il sera là pour le remplir un peu. Donner de la vie, de la chaleur à ton foyer trop parfait, aux murs trop propres, trop blancs. Malgré les nombreuses peintures si belles et chères.

Tic, tac.
Tu te redresses, passes ta veste sur tes épaules et t’éloignes rapidement de ton bureau, un dernier ordre bien sentit au coin des lèvres. Tout doit être fini pour demain matin. Même si toi, tu pars bien tôt. Tôt pour le rejoindre plus vite ? Même pas. Parce qu’il ne sera surement pas là avant l’heure. Non. Lui aussi, à une vie bien remplit. Sourire en pensant à lui. Parcourir la ville est rejoindre ta villa. Si belle. Une œuvre architecturale dont tu es particulièrement fier. Même si…trop vide.

Un soupir, un petit rire.
Tu es déjà là, assis sur ton canapé, premier verre entre tes doigts.
T’as laissé la veste au vestiaire, la cravate s'est également égarée en chemin, les premiers boutons de ta chemise défaits. Tu es là, un peu nonchalant. Et pourtant, comme depuis quelques mois. Tu penses. Surement un peu trop. Trop. Qu’est-ce que la vie ? Qu’as-tu fait de la tienne ?

Est-ce l’âge, Olly ?
Tic, tac.
L’horloge égraine ses heures.
Tic, tac.

Le premier verre s’est vidé sans que tu ne t’en rendes compte. Vide là, dans le creux de ta main, tu sais. Que tu t’es mis à boire surement un peu trop. Mais, tu penses en avoir besoin. Pour oublier un peu, tout ça. Même si tu ne sais pas ce qu’est le ça. Un bruit de pas. Et tu sais qu’il est là. Lysandre et le seul qui a les clés de chez-toi. Le seul que tu autorises à rentrer, peu importe le jour, peu importe l’heure. Doucement, tu déposes ton verre, cliquetant là, sur la table en verre. Te redresser, lui sourire, vraiment ? Parce que James, il n’y a pas de sourire sur tes lèvres. Tu te sens bizarre ces derniers temps.

Tic, tac.
L’horloge égraine ses heures.

T’approcher, le regarder. Tu as jamais su. Comment. Comment il était possible qu’il soit prêt de toi. Lui, qui pourrait sûrement avoir bien d’autres amants. « Bonsoir Lysandre. » Lui sourire. Mais, il n’y a pas de sourire sur tes lèvres. Non. James, tu sembles si soucieux.

James.
L’horloge égraine ses heures.
Tic, tac.

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tes pas se font lourds, tu fais les cent pas dans ton bureau. que faire ? tu ne sais pas. tu doutes rarement, mais quand c'est quelque chose d'aussi important, le doute s'installe, la zizanie est semée. tu en meurs d'envie, mais tu n'as point envie de décevoir, l'une des seules femmes de ta vie, ta génitrice. l'une des personnes pour lesquelles tu as le plus de respect, et pourtant tu sacrifies toute ta vie amoureuse pour elle. te marier ne t'empêcheras certainement pas d'aller voir d'autres personnes. surtout pas james, bien qu'il soit ton aîné d'une vingtaine d'années. tu t'en fous un peu au fond, tu comptes pas sacrifier de sacrées nuits à ses côtés juste parce que tu es "promis" à une autre. tu cogites pendant encore une heure, puis ta décision est prise. tu as décidé d'honorer la dernière volonté de ton père, même si c'était un peu une ordure, et qu'au fond tu le fais juste pour ta mère. il est presque vingt heures lorsque tu te décides à partir de l'immeuble où tu travailles, ou du moins, tu supervises, parce que tu fais pas grand chose, il faut l'admettre. tu traverses la ville jusqu'à staten island, où se situe la demeure de james. tu gares ta voiture devant chez lui, n'oubliant pas de prendre tes clefs. tu insères la clef ans la serrure, puis rentre dans la maison. tu es le seul à avoir les clefs, du moins tu le penses, et tu l'espères. tu poses ton manteau dans la cuisine, puis rentre dans le salon, où est assis james, qui t'attends, un verre de whisky à la main. tu ne perds pas plus de temps et te serres un verre aussi, c'est comme votre rituel. bonsoir james. tu glisses ta main gauche dans la poche de ton pantalon, toujours en costard, ta chemise blanche est légèrement déboutonnée à cause de la chaleur, et tu décides rapidement de poser ta veste, afin de n'être vêtu que de ta chemise sur le haut de ton corps. tu t'assois près de lui, tout en buvant tranquillement ton verre. tu as passé une bonne journée ? tu es détendu, tes doutes se sont envolés, ton esprit est apaisé.

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Tu suis le moindre de ses faits et gestes. Il fait comme chez lui. Mais, ne l’est-il pas un peu ? Chez lui. Si, surement. Depuis le temps qu’il vient, qu’il s’assoit là, à tes côtés. Tu le suis des yeux, la veste qui s’enlève, la chemise qui reste. Cachant la peau que tu sais si douce. Et tu sens, que le fait qu’il soit là te détend déjà. Rien que sa présence t’aide et t’apaise, souvent, tu te demandes pourquoi, ou comment ? Mais, non. Pas ce soir. Ce soir, tu en as marre de te poser toutes ses questions. Les yeux qui se ferment un instant, sa voix qui se glisse dans l’air et enfin. Enfin James un sourire vient glisser sur tes lèvres. « Longue… Vraiment trop longue. » Parce que tu as trop réfléchi, trop bossé, trop pensé à ce soir peut-être aussi un peu. Rouvrir les yeux te servir un autre verre et le regarder. « Et toi ? » Tu sais…

Oui, parce qu’elle t’en a parlé. Tu es l’avocat de la famille. Cette histoire. Il y a des papiers des… Tu sais. Mais, tu ne lui diras pas non. Tu n’as pas envie de lui en parler. Parce qu’il doit suffisamment y penser comme ça. Est-ce qu’il arrêtera de venir ? Tu espères que non. Et, tu remercies tous les Dieux que tes parents n’aient pas fait la même chose. Car, ils auraient pu, oh oui. Mais non, ils t’ont laissé gérer ta vie et…Et te voilà à plus de cinquante ans, célibataire et irrémédiablement seul. Sans héritier, sans personne pour la suite.

Tu reviens ici, au moment présent et le regarde. Et… Tu te penches soudainement pour glisser rapidement tes lèvres sur le coin de sa bouche. Soupirer. Respirer. « Putain…je suis tellement content que tu sois là. » James, ça t’arrive pas souvent de faire ça. Non. Pas comme ça. Mais, aujourd’hui… Aujourd’hui est un jour de merde.

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tellement détendu. comme si une mélodie se jouait dans ta tête, alors que pas du tout. l'orage avant le beau temps. tu jubiles, tu extériorises, tu t'échappes. tu oublies tes problèmes, juste le temps d'une soirée. une soirée qui s'annonce aussi reposante que longue. tu esquisses un léger sourire sur ton visage, lorsqu'il t'annonce qu'il a passé une longue journée, tu partages le même état d'esprit. on va dire que c'était plein de réflexions à la con. tu n'as pas envie de débattre sur ce sujet, il le sait. il sait aussi bien que toi que tu vas te marier, que c'était pas ton choix, que ça l'est toujours pas. et ça ne le sera pas, un forcené, voilà tout. trop de pensées ont traversées ton esprit aujourd'hui, tu n'as pas envie de te prendre encore plus la tête. tu refuses tout simplement de le faire. le seul point positif dans ta vie, c'est que la finira pas seul. officiellement du moins, ta mère te tuerait si tu demandais un divorce ou annulait cette mascarade. et ton meilleur ami t'enterrerait vivant si tu faisais du mal à sa petite soeur. tu sens son regard brûler ta peau, d'une façon agréable, un peu comme une brûlure d'affection. il glisse rapidement ses lèvres sur les tiennes, et se remet dans la même position qu'avant. tu sais qu'il a eu une journée difficile, son comportement te l'indique, mais ça ne te déplaît pas pour autant. tu bois cul sec la fin de ton verre, ce qui t'arrache une légère grimace, puis te lèves et pose directement tes lèvres sur celles de ton aîné. moi aussi, je suis content d'être là. tu lui adresses un clin d'oeil, avant d'aller chercher ton paquet de cigarette dans ton manteau, et tu reviens t'asseoir non loin de lui. tu allumes sans plus tarder une cigarette, et lui tend ton paquet. et dis moi tout, pourquoi cette journée a-t-elle été aussi longue ?

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Des réflexions à la con. Un peu comme toi finalement. Trop de pensées, trop d’idées noires, peut-être aussi. Fermer les yeux, soupirer et sourire. Sourire en sentant ses lèvres contre les tiennes. Comment pouvait-il être encore là. Ici, avec toi. Comment alors qu’il était si jeune. Si beau ? Et toi… Putain… Soupire lasse, tu le suis, le dévores du regard. Tu voudrais l’attraper là, pas la nuque et garder ses lèvres contre les tiennes. Oui, t’aimerais. Mais, il s’installe à nouveau à tes côtés, cigarettes au bec et, tu le remercies en attrape une que t’allumes bien vite. Extase. T’as jamais su t’arrêter. T’as jamais pu t’arrêter. Peut-être un peu de la même façon que t’as jamais pu t’éloigner de lui. Même avant, même maintenant.

« Oh. » Ta journée. Tu sais vraiment pas si t’as envie de lui en parler. Si t’as envie de lui dire, tout ce qu’il te passe par la tête en ce moment. Toutes ces choses qui tournent et retournent. Parce que c’est…sans sens. C’est sans queue ni tête. Et tu sais pas. Ce que ça veut dire. Tu sais pas. « Juste plein de paperasses. » Oué, des papiers, tellement. Ta main glisse lentement sur ton visage, tu es lasse James. « Et je me sens vieux. » Un rire rauque. Quel con. Tu te penches attrape la bouteille pour remplir ton verre que tu bois cul sec. Te sentir vieux et seul. T’as l’impression d’être un vieux con qui fait sa crise de la cinquantaine. Idiotie. Il n’y a bien qu’à Lysandre que tu peux sortir des trucs pareils. Les autres, ils ne savent rien. Les autres, ils ne te connaissent pas ne serait-ce même qu’un peu. T’es que le diable déguisé en humain. Oué, t’es rien d’autre qu’un monstre aux yeux de beaucoup.

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tu te sens, bien. sa présence t'es bénéfique, et ce depuis des années. il t'as vu grandir, james. à vrai dire, il connaissait ton père, tu ne te souviens pas d'un moment où il n'était pas présent dans votre vie. mais voilà que, tu es désormais à tête de l'entreprise, avec un grand frère qu'il n'en a pas voulu, et une petite soeur aussi belle qu'insupportable. vieux. tu esquisses un sourire, puis un franc rire s'échappe de ta gorge. vieux peut-être, mais plus en forme que certains de mon âge. ton âge. cette phrase te fait réaliser ta situation. tu vas te marier dans quelques mois, mais voilà que tu couches avec l'avocat de ta famille, un homme qui t'as vu grandir, cette relation n'a pas vraiment de sens. au fond james, tu l'aimes, mais que comme un ami. y aura jamais plus, comment pourrait-il de toute façon ? ta mère ne l'accepterai même pas, la possibilité que son fils aime un homme ? jamais de la vie. quand tu y penses, james tu ne l'as jamais vu dans une relation stable, pas de copine avec une relation plus longue que quelques semaines, encore moins un mariage ou des enfants. pourquoi tu trouves pas quelqu'un ? ça t'aiderait sans doute.

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